Au bord du burn out, déprimés, victimes d’une épidémie de cancers sans précédent, intoxiqués aux pesticides… Les idées alarmistes ne manquent pas concernant la santé des agriculteurs. Alors, l’agriculture est-elle vraiment le métier de tous les dangers?

Selon l’étude de la DREES (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques) réalisée en 2015 «L’état de la santé de la population en France» les paysans auraient une espérance de vie égale à celles des professions indépendantes ou des chefs d’entreprise. Si ces chiffres, confirmés par l’Insee tendent donc à rassurer sur la santé des agriculteurs, ils soulèvent également de nombreuses questions. Comment expliquer que les producteurs agricoles, exposés à des conditions de travail particulièrement difficiles – activités physiques intenses, travail en extérieur et rythme très chargé – puissent avoir une espérance de vie comparable à celles de travailleurs aux professions bien plus épargnées?

Comme bien souvent en matière d’agriculture, tout est une affaire de nuance. Si l’espérance de vie des agriculteurs est élevée, leur bonne santé elle, est relative. L’exercice de ce métier «passion» usent les organismes et entraînent des limitations fonctionnelles fréquentes et précoces : maladies cardio-vasculaires, troubles musculo-squelettiques qui touchent les muscles, les tendons, les nerfs… Les agriculteurs vivent donc un peu plus longtemps, mais en moins bonne santé que la moyenne.

Si certains de ces troubles touchent l’ensemble des professions manuelles, la santé des agriculteurs a aussi ses spécificités. Les femmes et les hommes du monde professionnel agricole ont ainsi moins de risque d’être atteints par un cancer que le reste de la population générale : – 24% pour les femmes et -30% pour les hommes*. Cet écart significatif s’explique principalement par le fait que leur addiction au tabac est de 50% inférieure. Or, le tabagisme actif est la première cause de mortalité évitable en France ; elle est responsable de 90% des cancers du poumon et de 73 000 décès prématurés chaque année en France** (INPES, 2014)

Si le cancer est malgré tout à l’origine de 36% des décès chez les hommes et 27% chez les femmes travaillant dans l’agriculture, les maladies cardiaques et respiratoires restent la principale cause de mortalité chez les agriculteurs.

Mais si l’agriculture n’est pas le métier de tous les dangers, elle reste une profession particulièrement exposée aux accidents de travail, qui menacent la santé au quotidien.
Alors que les pesticides sont aujourd’hui montrés du doigt par l’opinion publique, les accidents professionnels agricoles sont pourtant presque essentiellement liés aux activités avec les animaux et le matériel. Le facteur «autres éléments» source d’accidents, c’est à dire les produits chimiques, l’usage de l’électricité ou les éléments atmosphériques représentant 3,3% de ces accidents.

Qu’il s’agisse de l’environnement, des nouvelles technologies ou la santé, comme souvent le milieu agricole tord le cou aux idées reçues. Loin de l’image de profession où il ne fait pas bon vivre, l’agriculture est plus que jamais un métier passion dont les conditions de travail ne cessent de s’améliorer.

*Enquête Agrican démarrée en 2005, et toujours en cours
**sources : INPES, 2014