Environnement
mai 17, 2017
Mise sur le marché des pesticides : mode d’emploi.
Depuis quelques années, la défiance est de plus en plus grande envers ces produits pourtant utiles à la productivité et la compétitivité de l’agriculture française. Sur Résonnances, nous préférons nous baser sur les faits et rien que les faits pour vous parler des pesticides et répondre à une nouvelle question d’actualité : comment sont-ils mis sur le marché?
Aujourd’hui, la mise sur le marché des produits phytosanitaires est très encadrée. Respect des critères environnementaux et du cadre toxicologique, fourniture de preuves de l’efficacité des produits… Pas question de passer du laboratoire au champ sans se soumettre à une série de procédures obligatoires, l’homologation des produits pharmaceutiques devant répondre aux exigences du règlement européen. En effet, la mise sur le marché de substances actives est placée sous la dépendance de l’EFSA (agence européenne) et celle des produits commerciaux utilisables par les agriculteurs doit être accordée par chaque État membre et placée sous la surveillance de l’ANSES (agence sanitaire) pour la France.
Alors comment un produit obtient-il son autorisation de mise en marché ? Dix ans de procédure minimum sont nécessaires pour vérifier toutes les conditions d’utilisations exigées, que seule 1 molécule sur 150 000 environ satisfait.
Pour commencer, l’industriel doit soumettre son produit à 300 études exigées par la réglementation européenne. La répartition des coûts est la suivante :
– 40% portent sur les risques environnementaux
– 50% encadrent les impacts sur la santé
– 10% des coûts financent et assurent l’efficacité agronomique,
Ce qui fait que 90% des coûts concernent des aspects sécuritaires.
La molécule est ensuite formulée et transformée en produit commercial utilisable, ce qui entraine de nouvelles recherches tout aussi sécurisées : élimination des solvants pétroliers, mise au point de granulés dispersibles, sachets solubles, formulations aqueuses… Rien n’est laissé au hasard quand il s’agit d’enquêter sur une molécule, ses métabolites et ses coformulants. La prise en compte de la balance des bénéfices et des risques de la spécialité commerciale est ensuite effectuée en France pour les experts de l’ANSES. Au total, il en coûte plus de 200 millions d’euros à un industriel pour faire homologuer un produit, un investissement multiplié par 7 en 20 ans. Enfin, c’est au Ministère de l’agriculture* qu’appartient la décision finale d’accordée sa mise en marché, qui devra suivre un nouveau processus de ré-homologation tous les 10 ans.
Non seulement les pesticides ne courent pas à travers champs en toute liberté, mais en plus, leur marché s’assainit chaque jour d’avantage depuis 60 ans :
– 74% des molécules disponibles au début des années 90 ont disparu du marché dont 53 considérées comme les plus préoccupantes.
– La toxicité moyenne des substances actives a été divisée par 8,5.
– Les doses moyennes homologuées pour traiter un hectare ont été divisées par plus de 34.
– L’évolution des pulvérisateurs est encadrée par la directive européenne des machines neuves.
– Les limites maximales de résidus soit la quantité maximale de résidus de substance active tolérée dans les produits alimentaires ont été revues, corrigées et harmonisées au niveau européen par le règlement 396/2005/CE entré en vigueur le 1er septembre 2008, modifications coordonnées avec les dispositions mondiales équivalentes (depuis 1963) gérées par l’OMS (Office mondiale de la santé).
– La sécurité des promeneurs et des riverains est spécifiquement évaluée d’une manière systématique par des études basées sur les situations les plus extrêmes en termes de durée et de conditions d’exposition. Les modèles européens les plus récents qui encadrent ces évaluations sont rentrés en vigueur le 1er janvier 2016.
– La lutte contre les contrefaçons des pesticides a été renforcée en Europe.
– La conception des emballages (ergonomie, dispositif anti-éclaboussures, la suppression des opercules, la facilité de nettoyage, les dispositifs de transfert sécurisés, la traçabilité et le recyclage ont été améliorés.
– Les nombreuses études, enquêtes, analyses post-homologation réalisées sur le terrain depuis plusieurs décennies, sont communiquées aux praticiens par voie d’informations structurées.
En résumé, une étude des faits et rien que des faits met en lumière une mise sur le marché des pesticides contrôlée, où chaque acteur du secteur s’investit pour une commercialisation raisonnée.
* Suite à la loi du 13 octobre 2014 d’Avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt (LAAAF), les autorisations ont été transférées du Ministère de l’agriculture (MAAP) à l’ANSES qui a la charge de l’ensemble de ces missions (évaluations, décisions, autorisations) à partir du 1er juillet 2015 ; à cela s’ajoute un nouveau processus de ré-homologation tous les 10 ans.