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L’agriculture, bientôt délogée de l’Hexagone?

Ce n’est pas la 1ère fois que le blog de l’agriculture expliquée par ceux qui la connaissent vous en parle, nos champs sont en pleine crise du logement ! Pas question ici de blâmer AirbnB. Le responsable sur le banc des accusés aujourd’hui, c’est l’artificialisation des sols français. Suivez- nous, votre blog favori vous propose une visite guidée de l’immobilier agricole français !

Avant toute de chose, l’artificialisation des sols, qu’est-ce que c’est? C’est tout simplement la transformation de terres agricoles en surfaces destinées à un autre usage. Autrement dit, ces sols artificialisés peuvent être tout sauf des sols à usage agricole ou forestier : logements, résidences secondaires, hôpitaux, bureaux, universités, salles de spectacles et de sports, musées, usines, hangars, centres commerciaux, routes, voies ferrées, parkings, chemins, cimetières, terrains vagues, carrières, chantiers, décharges, ou même golfs ! Ces espaces artificialisés sont pour les deux tiers constitués de sols imperméabilisés (sols non bâtis comme les routes et sols bâtis) et pour le dernier tiers de surfaces non imperméabilisées (sols enherbés comme les jardins).

Aujourd’hui en France, ces sols artificialisés occupent 9,3% du territoire métropolitain, soit près de 5,1 millions d’hectares ou l’équivalent de la superficie totale cultivée en blé tendre en France. Avec une expansion de l’artificialisation de + 0,80% par an depuis 2010, certaines années, c’est la surface de 320 terrains de football qui disparait chaque jour. Pas étonnant donc que pour Pascal Canfin,président de WWF France, elle soit« la première cause » de la disparition de la biodiversité et de la dégradation des sols.

Mais pourquoi ce phénomène est-il si mauvais pour l’agriculture ? D’abord parce qu’il entraine une perte inestimable de ressources en sols agricoles et pour les espaces naturels pardi. Ensuite, parce que même si cette artificialisation est parfois temporaire, la nature de ces sols se trouve bien souvent profondément modifiée, voire complètement bouleversée. On constate par exemple un accroissement de leur imperméabilité, ce qui les rend inopérants dans la régulation hydrique et ne leur permet plus de jouer leur rôle tampon en cas d’inondations. Problèmes de ruissellement, création d’îlots de chaleur urbains, pollution des sols, des eaux et de l’air, le bruit, disparitions d’espèces au profit d’espèces invasives… La liste des impacts négatifs de l’artificialisation sur l’environnement et l’agriculture des sols est longue.

Comment expliquer alors, que face aux dangers de surfaces agricoles en voie de disparition dans l’Hexagone, cette mutation des sols continue son expansion ? La dynamique de l’artificialisation des sols est alimentée structurellement par la progression démographique et par la densité de population au km², avec en bonus, l’extension de l’habitat individuel, du réseau routier et le développement des infrastructures en périphérie urbaine. En résumé ? Parce que nous sommes toujours plus ! Résultat, aujourd’hui encore 58% de la construction se fait par l’artificialisation des sols. Mais pas question pour le blog de l’agriculture expliquée par ceux qui la connaissent de faire porter le chapeau de la crise du logement des champs aux amateurs de maisons individuelles seulement ! La logique économique entre aussi en jeu : c’est simple, un terrain urbanisable a beaucoup plus de valeur qu’un terrain non urbanisable. Les propriétaires terriens qui savent additionner 1 + 1 n’hésitent donc pas à artificialiser leurs biens fonciers.

Si rien ne change, le taux d’artificialisation – actuellement proche de 10 % – s’élèvera à 14 % en 2050 et 20 % en 2100. Une catastrophe pour l’environnement et l’agriculture. Comment lutter contre cette crise du logement des sols agricoles annoncée ? Heureusement pour nos champs, les politiques de lutte contre l’artificialisation ne cessent de se renforcer :

  • En 2006, la Commission européenne publie un projet de directive cadre sol.
  • Le 27 juillet 2010, la loi de modernisation de l’Agriculture et de la Pêche divise par deux la consommation des espaces agricoles.
  • En 2015, les ministères en charge de l’agriculture et de l’environnement proposent un cadre national pour la gestion durable des sols et la FAO proclame« 2015, année internationale des sols ».
  • En 2016, la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages impose le principe de compensation écologique.

L’objectif de ces mesures ? Permettre une absence de perte nette de la biodiversité via des impératifs de compensation et une obligation de résultats, laissant espérer d’atteindre un jour le 0 artificialisation. Aujourd’hui, cet objectif semble encore très ambitieux au vu des dommages déjà occasionnés par l’artificialisation et aux contextes juridiques, financiers et environnementaux extrêmement variés de ces sols. Il existe pourtant une autre piste pour lutter contre cette crise du logement des champs. Celle de régler la crise du logement des Français en rendant accessible au moins une partie des 3 millions de logements vacants (+ 50% en 10 ans) et de rénover ou moderniser les voies ferrées existantes plutôt que d’en créer de nouvelles… et bien d’autres actions encore.