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La poudre de lait, de la ferme à vos papilles

« Une, deux, trois… zut combien j’en ai mis déjà ? » Tous les parents se sont déjà posés cette question devant le biberon de leur rejeton au beau milieu de la nuit. Car oui, ce n’est pas une surprise, la poudre de lait est l’ingrédient phare des 1ers mois de beaucoup de bébés ! Mais savez-vous depuis quand et comment elle est fabriquée ? Le blog de l’agriculture expliquée par ceux qui la connaissent vous dit tout sur cette poudre qui fait son chemin de la ferme aux tétines des tout-petits.

Commençons nos explications par un peu d’histoire : avant de se répandre dans le monde comme une trainée de poudre, la farine de lait est née de l’imagination d’un industriel américain en 1851. Ce dernier cherche un moyen simple pour réduire la masse de lait afin de faciliter son transport et son stockage. Action – réaction, il invente le lait concentré qui permet une conservation sans réfrigération. Quelques années plus tard en 1860, le pharmacien Henri Nestle – qui ne va pas tarder à se faire un nom – crée lui une farine laitière à base de lait de vache et de céréales pour réduire la mortalité infantile. Mais c’est en France que deux innovations consécutives vont permettre sa commercialisation à grande échelle : en 1908 d’abord, Maurice Guigoz réussit à obtenir de la poudre de lait en la chauffant sous vide. En 1937, nouvelle avancée, il met au point le procédé de stérilisation toujours d’actualité (dit UHT qui consiste à porter instantanément un produit à près de 140 degrés pendant 2 à 3 secondes). Il n’en fallait pas plus à la poudre de lait pour devenir la star des biberons dans le monde entier dès la seconde guerre mondiale.

Et si nous nous penchions maintenant avec un peu plus d’attention sur sa fabrication ? Tout commence tôt le matin dans de très nombreuses exploitations laitières de France et de Navarre où lors des deux traites journalières, du lait frais composé à 87,5% d’eau est récolté. Celui-ci est refroidi dès la traite à la ferme dans des tanks, et ensuite transportés dans des camions citernes alimentaires spécifiques jusqu’à l’usine où des analyses sont réalisées pour vérifier sa conformité. Il est après standardisé car selon les saisons, le stade de lactation ou le régime alimentaire des vaches, sa composition varie. C’est alors qu’intervient la pasteurisation qui élimine tous les germes nocifs. Ensuite le lait est préchauffé avant d’être concentré : comme son nom l’indique, cette phase permet de réduire la part d’eau via des procédés de type microfiltration. Elle est indispensable pour pouvoir passer à la seconde phase : le séchage complet qui lui, est réalisé le plus souvent par atomisation dans une tour de séchage (méthode Spray). Le lait concentré est pulvérisé dans un courant d’air chaud en haut de la tour et en bas on obtient… notre poudre de lait pardi ! Si sa méthode de fabrication ne varie pas ou peu, la farine de lait peut cependant être de composition différente selon son origine – lait entier, partiellement ou totalement écrémé – à laquelle on peut ajouter si besoin sucres, matières grasses ou additifs. Résultat, on retrouve des poudres grasses, maigres ou infantiles afin de répondre à la segmentation des marchés tant en France, qu’à l’export. Notons enfin que sa réglementation est devenue de plus en plus contraignante, comme dans toutes les industries agroalimentaires pour éviter les dérives et les scandales (comme celui de la poudre frelatée en Chine en 2008). Ça y est, maintenant que vous savez tout sur sa fabrication, et si nous en disions un peu plus sur ces nombreuses – et parfois insoupçonnées – utilisations ?

En effet, la poudre de lait présente de nombreux avantages qui permettent de multiplier ses usages :

  • Une durée de conservation très longue (jusqu’à 2 ans pour certaines).
  • Un stockage sans réfrigération, à conditions de respecter des ambiances très sèches.
  • Un gain très important pour le transport, surtout pour les longues distances.
  • Sa fabrication permet de constituer des stocks de report en cas de surproduction temporaire.
  • Lors de crises alimentaires, cette poudre est une ressource protéinée facile à transporter et à utiliser si la population dispose d’eau potable.

Sans surprise donc, on retrouve la poudre de lait dans de très nombreux secteurs. L’un des plus connus est bien sûr celui du lait infantile que nous évoquions déjà plus haut. Mais l’industrie agro-alimentaire est elle aussi très gourmande de farine de lait qu’elle utilise pour la fabrication de gâteaux, de bonbons, de glaces et de crèmes glacées, de certains desserts lactés, de plats préparés, de potages, et d’émuslions. Moins connue, l’utilisation de poudre pour l’alimentation des veaux est aussi importante que fréquente dans de très nombreuses exploitations ! Elle concerne les veaux pendant les 2 à 3 premiers mois de leur vie en élevage laitier et les élevages de veaux de boucherie pendant toute leur durée d’engraissement. Des formules différentes existent d’ailleurs pour répondre aux objectifs de développement et de croissance et pour les éleveurs ce système d’allaitement reconstitué avec de la poudre, permet une rationalisation des tâches répétitives journalières grâce à des robots de distribution qui permettent à chaque animal d’obtenir sa ration spécifique.

Mais alors, cette poudre de lait n’a-t-elle que des qualités ? Tut tut tut ! Son impact environnemental reste très discuté avec un bilan carbone qui grimpe lorsque l’on prend en compte toutes les étapes de sa fabrication, en particulier l’énergie utilisée pour le séchage ou encore ses frais d’emballage et de reconstitution. Par ailleurs, il existe aussi des risques de déstabilisation de la filière laitière dans certains pays du sud quand il y est exporté alors qu’il est produit dans des pays du nord à coût bas et subventionné. Ajoutons que dans certains pays, à certaines périodes, l’incitation à consommer du lait en poudre a entrainé le recul de l’allaitement maternel. Ce qui a conduit à la mise en place d’une règlementation stricte concernant la promotion de ces produits infantiles, en particulier dans les maternités. Sans surprise donc, comme tous les produits issus de l’agriculture, la poudre de lait doit elle aussi réussir sa transition écologique et économique dans les prochaines années !