Environnement
mai 10, 2016
Pourquoi les haies font-elles leur come-back?
Haies ou pas haies, that is the question. Entre 1960 et 1980, une mesure, à elle seule, a redessiné le paysage rural et bousculé des habitudes ancestrales : le remembrement. Instaurée en 1941 mais réellement appliquée des années plus tard, cette disposition avait pour but de regrouper des terres en un seul tenant pour faciliter leur exploitation. Le coup fut rude de prime abord pour les paysans, habitués depuis toujours à cultiver des terres certes morcelées, mais dont chaque champ avait une histoire à laquelle ils étaient très attachés. Cependant, avec le temps, les agriculteurs réalisèrent les bénéfices de la mesure.
Bon nombre de haies quant à elles, furent les victimes silencieuses et oubliées du remembrement. Binées, arrachées, transformées en petit bois, remisées, celles qui longtemps eurent pour mission de délimiter les petites parcelles les unes des autres, ces gardiennes du temple de la propriété disparurent sans préavis du paysage rural. (Précisons tout de même que tout le territoire français n’a pas été traité d’une manière identique.)
La reconstitution des haies, là où cela est nécessaire, s’inscrit dans le projet trame verte trame bleue (TVB) dont l’un des objectifs est de rétablir des couloirs écologiques, véritables ‘’sentiers’’ permettant aux différentes espèces « utiles » (faune et flore) de voyager plus facilement afin d’assurer leur survie et leur dissémination. Ce projet français, s’inscrit dans la démarche du réseau écologique paneuropéen et de la nouvelle stratégie de l’Union européenne sur la biodiversité.
Oubliées de tous pour autant ? Seulement pour un temps. Depuis plusieurs années, des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent en faveur de leur réhabilitation. En effet, c’est presque grâce à leur disparition momentanée que leur rôle primordial dans les paysages, le maintien de l’équilibre de la faune et de la flore… s’est révélé.
On constate tout d’abord que l’éradication des haies favorise l’érosion. Car avec elles, ce sont les talus qui furent arasés. Or, les racines des arbres et des buissons stabilisaient les talus, tout en favorisant l’infiltration des débuts de ruissellement, évitant ainsi la création de ravines, et protégeant aussi les cultures et le paysage de l’érosion.
Si hier les haies constituaient une entrave à la mécanisation de la culture, aujourd’hui elles ne sont plus un obstacle aux grandes manœuvres, grâce au perfectionnement des technologies et sont largement réintroduites par les agriculteurs.
Composées sur mesure d’arbres à hautes tiges, elles profitent également aux vergers qu’elles protègent des rafales trop fortes en jouant les coupe-vent, tout en favorisant l’évapotranspiration des cultures. Parfois, il est vrai ce type de haies peut au contraire faire ombrage à certaines cultures d’été qui ont besoin de se dorer la pilule pour grandir…
Si certains souffrent de leur froideur, d’autres apprécient leur chaleur. Les haies sont en effet productrices de bois, principalement énergétique : 100 mètres de haies peuvent ainsi chauffer un pavillon pendant un an.
Protectrice de l’environnement, briseuse de bise et bois de chauffage, décidément les haies ont plus d’une branche à leur buisson. Mais elles sont avant tout les garantes de la biodiversité : à la fois garde-manger pour le gibier et les oiseaux, abris pour colonies de carabes et de syrphes (mouches dont les larves se nourrissent d’insectes) qui limitent la prolifération de pucerons et des limaces ou encore hébergement pour campagnols ravageurs. Elles protègent donc les cultures autant qu’elles les menacent en servant de refuge à leurs ennemis naturels comme les rongeurs ou les mauvaises herbes.
Si aujourd’hui, le rôle des haies dans le paysage agricole est indéniable, pour que leur come-back soit un succès retentissant, paysans et buissons doivent se redécouvrir et retrouver un équilibre naturel pour le bien des cultures.
En attendant, une chose est sûre, les haies ne servent pas qu’à faire joli.