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Pourquoi les paysans n’ont plus le monopole des semences ?

Sur le blog de l’agriculture expliquée par ceux qui la connaissent, il n’y a pas de question bête. Comme vous, nous nous sommes demandés pourquoi les paysans ne ressemaient pas systématiquement leurs champs de blé avec le fruit de leur récolte. Économique, logique… Cette pratique vieille comme l’histoire de la céréale, 10 000 ans tout de même, semble pourtant n’avoir que des avantages. Mais qui empêche donc les agriculteurs de n’en faire qu’à leurs semences ?

Premières visées par cette polémique, les multinationales semencières semblent des coupables toutes désignées, prêtes à vider les granges des paysans de leurs semences pour engranger plus de bénéfices. À un conflit agriculteurs contre spéculateurs, nous préférons la réalité, plus nuancée.

Bien qu’historiquement les paysans utilisaient majoritairement leurs propres semences, en cas de récoltes médiocres, ils en achetaient volontiers aux voisins qui avaient de plus beaux blés. Unique moyen à leur disposition pour améliorer leurs semailles en vue d’obtenir de meilleures récoltes. C’est ainsi que sont apparus au XVIème siècle les maîtres grainiers et les premiers marchands de semences qui vendaient principalement à l’époque des semences de plantes fourragères et de légumes. C’est donc une pratique paysanne qui initia le commerce des graines et non l’inverse…

Ce sont également les plaintes des agriculteurs qui furent à l’origine de la première loi moderne sur les semences en 1905 ! Hé oui, si les agriculteurs étaient parfaitement capables de juger à l’œil nu si les grains étaient de bonne grosseur ou qu’ils ne montraient pas de signes de maladies, impossible par contre de vérifier leurs caractéristiques héréditaires. Exemple : les semences de blé d’hiver et de blé de printemps sont difficiles à distinguer visuellement et pourtant il s’agit de deux cultures bien distinctes qui comme leur nom l’indique ne se cultivent pas au même moment ; aussi une semence de blé d’hiver vendue comme blé de printemps pouvait entraîner une absence totale d’épi et donc une perte colossale pour l’agriculteur spolié. Au fil des années, cette « loi contre les fraudes et les falsifications » a été maintes fois remaniée mais elle puise toujours ses racines dans l’histoire paysanne.

C’est toujours pour mieux protéger les agriculteurs que la certification des semences, initiée en 1934 a été généralisée et rendue obligatoire en 1960, garantissant une concurrence loyale entre marchands. Depuis, son contrôle est assurée par le SOC*, organisme officiel sous la tutelle du Ministère de l’Agriculture et administrativement rattaché au GNIS (inter-profession du secteur des semences). Cette traçabilité officielle implique de répertorier chaque variété de semence et oblige donc son créateur à la faire inscrire dans un catalogue officiel, français ou européen.

Si aujourd’hui les cultivateurs n’ont plus le monopole de la semence, c’est avant tout pour protéger leurs droits et leurs récoltes que les gouvernements français puis européens ont initialement encadré les pratiques d’un cadre juridique.

*SOC. Service officiel de contrôle et de certification est un service technique du Groupement national interprofessionnel des semences et plants (GNIS).