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Peut-on nourrir tout le monde avec la production Biologique ?

Aujourd’hui le plus grand défi de l’agriculture est de nourrir le monde de demain . Face à une population en constante augmentation et des habitudes alimentaires en pleine mutation, l’augmentation de la productivité agricole est un enjeu international qui, combinée au réveil des consciences sur l’écologie, mobilise tous les professionnels du secteur. Comment produire plus en respectant davantage la planète ? En 2016, l’agriculture biologique s’impose pour beaucoup comme une solution alternative respectueuse de l’environnement. Mais l’agriculture biologique peut-elle vraiment nourrir tout le monde ?

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Mais d’abord, soyons précis : qu’est-ce que l’agriculture biologique ?

Contrairement à l’agriculture dite conventionnelle qui s’autorise à utiliser de façon raisonnée et adaptée toutes les innovations et les techniques de production disponibles et permises par la loi, l’agriculture biologique répond à un cahier des charges plus contraignant qui limite l’usage de certains intrants :

– Pas d’utilisation d’engrais ni de pesticides de synthèse, mais les engrais organiques, minéraux naturels et certains pesticides sont autorisés par le cahier des charges.

– Pas d’utilisation d’OGM (mais actuellement la culture d’OGM est interdite en France).

– Utilisation de « semences issues de production biologiques » (avec quelques dérogations si nécessaire).

Il y a une obligation de moyens mais pas d’obligations de résultats autres que celles qui s’appliquent à l’agriculture conventionnelle. La production biologique nécessite une certification par un organisme indépendant assurant que le cahier des charges est respecté.

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Si en termes d’hectares cultivés, l’agriculture biologique est bien inférieure à l’agriculture conventionnelle, qu’en est-il de ses rendements ?

Difficile de donner des chiffres précis sur les écarts de production entre l’agriculture conventionnelle et l’agriculture biologique. Mais comme cette dernière n’utilise pas de méthodes de lutte performantes contre les maladies et parasites des cultures, elle est davantage exposée aux caprices de dame nature (fluctuation climatique, variabilité de l’efficacité des engrais organiques, maladies, concurrence des mauvaises herbes, attaques d’insectes …). Globalement, les rendements sont moins réguliers, moins maîtrisés et moins importants en culture biologique, notamment en productions végétales.  En France, selon les productions et le degré de technicité de l’agriculteur bio, des écarts de rendements de -10% à -50 % peuvent être observés. En zone tempérée, des situations extrêmes seraient même à craindre : en pomme de terre par exemple en cas d’années humides, il est vraisemblable, qu’aucune récolte ne serait possible sans le recours à la protection fongicide contre le mildiou.

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Mais dans les pays en voie de développement (dont l’agriculture classique est peu performante), on observe que lorsque les principes de l’agriculture biologique sont appliqués cela conduit plutôt à un accroissement des rendements, grâce à une meilleure prise en compte des principes de raisonnement agronomique.

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Alors, l’agriculture biologique pourra-t-elle nourrir le monde ?

Comment nourrir plus de 9 milliards d’êtres humains attendus en 2050 et résoudre les problèmes de famine qui touchent encore près de 800 Millions de personnes dans le monde (FAO 2015) ?

La FAO signalait en 2009 que pour atteindre cet objectif, la production agricole devait s’accroître de 70 % pour satisfaire les besoins alimentaires, tout en limitant le gaspillage. Cet accroissement de production ne peut se faire que par l’augmentation des rendements car la mobilisation de terres nouvelles et productives est très limitée.

Dans ces conditions, la généralisation de l’agriculture biologique avec ses atouts et ses contraintes de production ne serait pas de nature à régler les problèmes alimentaires mondiaux. C’est d’ailleurs ce qu’a affirmé la FAO dès 2007 à l’issue d’une conférence internationale sur le sujet.

À titre d’illustration, une généralisation de la production biologique dans les cultures céréalières en France provoquerait une diminution de production de 19 à 32 millions de tonnes de céréales sur la base d’une production moyenne actuelle de 64 millions sur les 10 dernières années. D’exportateur net de 27 millions de tonnes de céréales (à destination de l’Europe et des pays d’Afrique pour l’essentiel) la France pourrait devenir importateur.

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Au niveau mondial, les experts estiment que la baisse de production des céréales entraînerait des baisses de stocks et des tensions sur les prix, avec pour conséquence des difficultés d’approvisionnement en denrées agricoles de 1ère nécessité pour certaines populations.

Toutefois il est vrai que le développement de l’agriculture biologique pourrait contribuer à accroître la production de certains pays en développement (qui pourraient ainsi réduire leur dépendance alimentaire). Pour y parvenir, il leur faudra une meilleure prise en compte des techniques agronomiques, avec une utilisation faible d’intrants chimiques auxquels ils n’ont économiquement pas accès. Cependant, cela n’est pas généralisable car certains sols sont trop pauvres et carencés pour permettre une augmentation de production comme l’a souligné la FAO en 2007 qui précise « qu’on ne pourra nourrir 9 milliards de personnes en 2050 sans utilisation judicieuse d’engrais chimiques ».

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Source FAOSTAT 2014

Alors, quelles stratégies pour augmenter la production mondiale ou européenne ?

Il faudra faire cohabiter différents modes de production agricole pour progresser dans la lutte contre la faim dans le monde source de bien des conflits et révoltes.

  • Soutenir le développement des productions vivrières locales,
  • Favoriser les échanges de nourriture entre les différents pays
  • Maintenir une offre diversifiée : dans les pays développés, les budgets consacrés à l’alimentation sont variables selon le niveau de vie des consommateurs et le prix des aliments labellisés bio est souvent un frein à leur développement. Tous les consommateurs doivent trouver des produits de qualité à des prix acceptables pour eux.
  • Tout faire pour encourager les pratiques respectueuses de l’environnement, en faveur d’une agriculture durable et pour cela poursuivre la recherche permettant de produire plus avec moins d’intrants.

La production agricole dite conventionnelle et l’agriculture biologique peuvent et doivent coexister et échanger sur leurs méthodes et leurs savoir-faire afin d’alimenter le monde, préserver la planète, favoriser les liens sociaux et être viable pour les agriculteurs.

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Sources : – Agence Bio « chiffres clés 2015 »

– Éditions QUAE  2012 « le tout bio est-il possible » Bernard le Buanec

– Inra 1015 « le bio peut-il nourrir le monde » conférence de Marc Benoît  13 mai 2015 – exposition universelle de Milan

– FAO 2007, 2015